Temps captif, 24x 35cm, 2020


La Crète ? Pourquoi la Crète ?

Encore archéologues, notre œil découvre des sols excavés baignés de lumières chaudes, surplombés d’arbres. Knossos, Mallia. Les palais Minoens et nous commençons à rassembler nos souvenirs de voyages. Comme des historiens nous partons vers notre passé sans penser que la faille dans le temps nous traverse aussi. Je pense alors : joli thème de méditation picturale pour l’époque ! Mélanger les temporalités, rechercher dans toutes sortes de sous-sols des évocations et soudain… Deux pages d’Asturias me reviennent (dans les Légendes du Guatemala). Je cite (à l’aide du livre, je n’ai pas trop de mémoire…) :

« Dans cette ville en étages, les cités antiques se conservent intactes. Par des escaliers montent des images de songes. D’une porte à l’autre on change de siècle…

On croit encore que les arbres exhalent l’haleine des personnes qui habitent des villes enterrées, et c’est pourquoi la coutume, légendaire et familière veut qu’à leur ombre viennent se recueillir ceux qui ont à résoudre des cas de conscience, chercher un soulagement, les amoureux en peine, s’orienter les pèlerins, et les poètes trouver l’inspiration. »

Une manière de peindre à premier abord classique (des noms comme Giorgione, Poussin, Le Lorrain, Hubert Robert sont prononcés) mais aussi très méditative. Ce qu’évoquent le sol et le sous-sol nous entraîne au vertige des âges, aux sensations qui secrètement doivent exalter toutes les âmes d’apprentis archéologues !



Deux choses me troublent alors. L’attention extrême du peintre à la texture du sol. Je suis amené à me poser cette question toute bête : sur quoi marche-t-on au quotidien ? Sur une matière, sur une lumière ou encore sur une membrane très fine entre plusieurs époques ? Voilà une peinture qui fait méditer mes pieds!

La seconde chose troublante est l’invention de petits personnages qu’Alain Saey dispose dans l’espace. Des passants, des enfants, des animaux, une femme assise assez mélancolique… peuplent et animent le paysage par leur geste et une tache de couleur qu’ils apportent. Qui sont-ils ? Et surtout à quelle époque appartiennent-ils ? Ni contemporains, ni antiques (ils ne sont pas habillés en touristes ni en habits anciens) indéterminés, équivoques… Ils me semblent incarner le lien légendaire dont parle si bien Asturias dans le passage cité plus haut. La méditation un peu romantique à première vue (sur les ruines) devient très contemporaine quand on lit « conscience », « soulagement », « orientation ».

Conscience d’une terre minérale, végétale qui nous est offerte avec ses strates, ce mille-feuille du temps. Soulagement du corps et de l’esprit dans une démarche d’équilibre avec le cosmos. Orientation vers un chemin créatif, une inspiration, une respiration en temps de confinements.

Regarder encore ces pierres énormes d’anciens murs effondrés, leur faire dire encore leurs secrets en changeant, comme au théâtre, la lumière et la couleur et sentir que l’éclairagiste pourrait devenir architecte. Sentir ces pierres comme des êtres anciens presque vivants dans nos mémoires, comme si elles restaient là, évidentes, indéplaçables, matérialisant le temps, et qui, pourquoi pas, viendraient nous combler.

Jacques Serres

Cet Écrin naturel, 30x30cm, 2020

Édification 2, 30x30cm, 2020



Présences familières, 30x30cm, 2020

Au coeur de la cité, 30x30cm, 2020




L’Esprit du temps, 38x46cm, 2020


Parenthèse minoenne, 30x30cm, 2020


Au fil du récit, 50x50cm, 20





L’Apparence d’un souvenir, 40x40cm, 2020





Soirée à Cnossos, 24x33cm, 2020





Paradoce nocturne, 38x45cm, 2020




Accalmie à Malia 2, 65x53cm, 2020



Duo antique, 60x60cm, 2020





Aux marches du palais, 30x30cm, 2020






L’Avant-scène, 30x30cm, 2020




Le Labyrinthe, 50x60cm, 2020